Le Pèlerinage constitue le cinquième pilier de l’islam. Dieu dit : « Et c’est un devoir envers Allah pour les gens qui en ont les moyens, d’aller faire le Pèlerinage. Et quiconque ne croit pas… Allah se passe largement des mondes. » (3 : 97).
« Et quiconque ne croit pas » veut dire : « Et quiconque se détourne du Pèlerinage ». Pour mettre en évidence l’extrême importance de ce pilier fondamental de l’islam, Dieu a utilisé le terme de l’incroyance pour exprimer le refus de l’observer. Dieu met ainsi en garde quiconque n’éprouvant pas un désir ardent d’accomplir le Pèlerinage et ne songeant pas à se rendre à la mosquée sainte de la Mecque pour s’en acquitter.
Dieu a instauré le Pèlerinage pour des finalités sublimes. Il l’a instauré pour que le musulman puisse exprimer et concrétiser le sens des enseignements, des valeurs et des principes auxquels appelle l’islam.
Quiconque médite le Pèlerinage, réalise qu’il renferme de nombreux secrets, à savoir :
1 – L’expression du sens de la soumission et de la résignation à la volonté de Dieu : En effet, l’islam est venu pour réaliser une manifestation complète de l’adoration de Dieu. Dieu ordonne et prescrit, et au serviteur de dire : « J’écoute et j’obéis ». Dieu a ainsi ordonné au musulman de se rendre à un lieu particulier pour y accomplir un certain nombre de rites purement cultuels, inintelligibles, d’une manière précise et détaillée. Il lui a ordonné d’exécuter sept tours autour de la K’aba, ni plus ni moins, en commençant par la pierre noire et par nulle part ailleurs. Auparavant, Il lui a ordonné de se mettre en état de sacralisation ; un état qui manifeste le renoncement aux passions et aux désirs de l’égo. Dieu a prescrit la lapidation des stèles ; un rite qui représente la résistance au mal, en mémoire d’Abraham qui jeta des pierres à Satan lorsque celui-ci tenta de le dissuader d’immoler son fils Ismâ’îl. Le Pèlerinage est riche de ce genre de symboles. En accomplissant ces rites, le musulman exprime le sens de sa servitude à Dieu. C’est pour cette raison qu’il répète cette formule : « labbaykal-lâhumma labbayk » ; « Seigneur Dieu, je réponds à ton appel ».
2 – La concrétisation de l’unité et de la concorde : Le Pèlerinage inculque aux musulmans le sens de l’union. La K’aba est en soi le symbole de l’unicité de Dieu et de l’unité de la communauté musulmane. D’ailleurs, l’islam est fondé sur la parole de l’unicité et sur l’unicité de la parole, ce qui se manifeste d’une manière évidente lors du Pèlerinage. En effet, pendant le Pèlerinage le sens de l’unité est manifeste : l’unité des sentiments, l’unité des rites, l’unité de l’objectif, l’unité des actions, l’unité des paroles ; point de nationalisme, ni de racisme, point de préférence d’ordre ethnique ou sociale. Les pèlerins sont tous des musulmans, croyant au même Dieu, tournant autour du même édifice, lisant le même Livre, suivant le même Prophète (ﷺ), exécutant les mêmes gestes… Telle est l’unité prônée par le Pèlerinage.
3 – La manifestation de la paix : Le Pèlerinage est un moyen exceptionnel pour inculquer au musulman le sens de la paix et du salut. Le Pèlerinage est un moyen d’enraciner l’esprit de la paix. C’est un voyage de paix vers une terre de paix en temps de paix. Le lieu du Pèlerinage accueille en effet la terre sainte et la mosquée sainte, un lieu choisi par Dieu pour être une source de salut et de paix. D’ailleurs, quiconque y entre est en totale sécurité[1]. ‘Umar ibn al-Khattâb dit : « Si j’y trouvais l’assassin de mon père, ma main ne pourrait le toucher ». Le Pèlerinage est donc un voyage de paix dans lequel le pèlerin est un salut pour les autres. C’est dans cet esprit que toute polémique est interdite pendant le Pèlerinage. Dieu dit : « Le Pèlerinage a lieu dans des mois connus. Si l’on se décide de l’accomplir, alors point de rapport sexuel, point de perversité, point de dispute pendant le Pèlerinage. » (2 : 197). Il est ainsi interdit à tout pèlerin de se disputer, de polémiquer, y compris pour accomplir des achats. Le pèlerin se doit d’être doux, indulgent, plein de mansuétude, pour que ce voyage s’effectue en paix. La paix qu’apporte le Pèlerinage s’étend aux animaux. En effet, il est interdit au pèlerin de chasser. Le Pèlerinage est également un salut pour les végétations puisque les plantations de la Mecque ne peuvent être arrachées. C’est ainsi que l’islam vise à ce que le musulman s’exerce à vivre en paix. Il vise à l’imprégner de l’esprit de la paix pour qu’à son retour, il soit un salut pour le monde.
4 – La réalisation de l’égalité : L’islam est venu éradiquer les différents facteurs de distinction d’ordre ethnique ou sociale qui ont divisé les êtres humains, et déclarer que tous les hommes sont égaux à l’instar des « dents du peigne ». D’ailleurs tous les actes d’adoration de l’islam sont une illustration du sens de cette égalité complète entre les gens. La salât, par exemple, est une invitation à l’égalité, une réalisation de l’égalité. Il ne peut exister dans la mosquée un protocole réservant les premiers rangs en fonction du rang social. Le premier arrivé à une place en est le plus digne. Dans la salât, le plus riche se met à côté du plus pauvre, le blanc à côté du noir, le gouvernant à côté du gouverné. Tous posent le front au sol pendant la prosternation en signe d’humilité devant le Seigneur de l’univers. Cependant, il demeure à la mosquée un facteur de distinction, à savoir, la tenue vestimentaire. En effet, les gens portent des vêtements qui reflètent leur classe sociale. Par contre, au Pèlerinage, tous se débarrassent de tous ces vêtements pour enfiler un vêtement, un tissu blanc et simple rappelant le linceul, pour rappeler au passage l’au-delà. Au Pèlerinage, tous les pèlerins sont vêtus de ce vêtement éradiquant ainsi tout facteur de distinction entre riche et pauvre. L’égalité est complète. Il n’est d’ailleurs pas étonnant que ce soit durant le Pèlerinage, le jour de ‘Arafa que le Prophète (ﷺ) s’adressa aux pèlerins et déclara : « Ô hommes ! Votre Seigneur est Un, et votre père est un. Nulle préférence n’est accordée à l’arabe par rapport au non arabe, ni au non arabe par rapport à l’arabe, ni au noir par rapport au rouge, ni au rouge par rapport au noir, qu’en fonction de la piété ».
Voici quelques finalités que le Pèlerinage vise à réaliser. Tout musulman se doit d’en être conscient pour l’accomplir en respectant à la fois la forme et l’esprit.
Moncef Zenati
[1] – Référence au verset 97 de la sourate 3.