Limites de la liberté d’expression en islam
La liberté d’expression n’est pas absolue, des bornes sont posées en cas d’abus. La Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 énonce que :
« La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l’homme, tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l’abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi ».
L’article 4 de cette même déclaration proclame : « La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui ».
Le principe est ainsi posé. La liberté d’expression n’est pas un absolu. Elle se trouve encadrée par de nombreuses limites fixées par la loi.
Il en est de même pour la liberté d’expression en islam. Plusieurs types de limites et de normes sont fixés à cette liberté dont les plus importants sont :
- Ne pas porter atteinte à la vie privée : « Ô vous qui avez cru ! N’entrez pas dans des maisons autres que les vôtres avant de demander la permission et de saluer leurs habitants. Cela est meilleur pour vous. Peut-être vous souvenez-vous. Si vous n’y trouvez personne, alors n’y entrez pas avant que permission vous soit donnée. Et si on vous dit : « Retournez », eh bien, retournez. Cela est plus pur pour vous. » (24 : 27 – 28).
- Ne pas porter atteinte à l’honneur et à la dignité de l’être humain, et ne pas tenir des propos diffamatoires ou injurieux : « Ô vous qui avez cru ! Qu’un groupe ne se raille pas d’un autre groupe : ceux-ci sont peut-être meilleurs qu’eux. Et que des femmes ne se raillent pas d’autres femmes : celles-ci sont peut-être meilleures qu’elles. Ne vous dénigrez pas et ne vous injuriez pas. » (49 : 11), « Ô vous qui avez cru ! Évitez de trop conjecturer sur autrui car une partie des conjectures est péché. Et n’espionnez pas ; et ne médisez pas les uns des autres. » (49 : 12).
- Ne pas inciter à la haine raciale, ethnique ou religieuse : « Ô hommes ! Nous vous avons créés d’un mâle et d’une femelle, et Nous avons fait de vous des nations et des tribus, pour que vous vous entre-connaissiez. » (49 : 13). Le Prophète (ﷺ) dit : « Ô hommes ! Votre Seigneur est Un, et votre père est un. Nulle préférence n’est accordée à l’Arabe par rapport au non Arabe, ni au non Arabe par rapport à l’Arabe, ni au noir par rapport au rouge, ni au rouge par rapport au noir, qu’en fonction de la piété ».
- Ne pas tenir des propos incitant aux crimes, à la violence, à l’effusion de sang et aux délits portant atteinte à la vie et à la propriété d’autrui : « Quiconque tuerait une personne non coupable d’un meurtre ou d’une corruption sur la terre, c’est comme s’il avait tué tous les hommes. » (5 : 32).
- Ne pas tenir des propos faisant l’apologie de l’incroyance et incitant à l’apostasie. En effet, chaque Etat est fondé sur des éléments constitutionnels dont la remise en cause est interdite par la loi.
- Ne pas tenir des propos incitant à la débauche, à la dissolution des mœurs et à l’usage de produits interdits (alcool, produits stupéfiants…).
- Formuler son opinion avec douceur et respect. En envoyant Mûsâ (Moïse) et son frère Hârûn, que la Paix de Dieu soit sur eux deux, Dieu leur donna cet ordre : « Allez vers Pharaon : il s’est vraiment rebellé. Puis, parlez-lui gentiment. Peut-être se rappellera-t-il ou [Me] craindra-t-il ? » (20 : 43 – 44).
- Vérifier les sources des informations avant de les diffuser : « Quand leur parvient une nouvelle rassurante ou alarmante, ils la diffusent. S’ils la rapportaient au Messager et aux détenteurs du commandement parmi eux, ceux d’entre eux qui cherchent à être éclairés, auraient appris (la vérité de la bouche du Prophète et des détenteurs du commandement). Et n’eussent été la grâce d’Allah sur vous et Sa miséricorde, vous auriez suivi le Diable, à part quelques-uns. » (4 : 83). Ce verset réprouve l’attitude qui consiste à diffuser des nouvelles et des informations avant de vérifier leur bienfondé. Le Prophète (ﷺ) dit : « Il suffit à la personne comme mensonge de transmettre tout ce qu’elle entend ».
- Ne pas tenir des propos interdits per l’islam : le mensonge, la médisance, le colportage (namîma), les insultes, le faux témoignage, les propos obscènes, la calomnie…
Ainsi, l’islam a instauré la liberté d’expression et l’a protégée. Mais il s’agit d’une liberté accompagnée d’une responsabilité. Il ne pourrait y avoir une liberté d’expression utilisée pour injurier les autres ou diffuser des valeurs dévastatrices pour la société. Il s’agit d’une liberté responsable. En dehors de ces bornes posées par la loi, elle ne doit pas se trouver indirectement et indûment limitée.
Moncef ZENATI